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Actualité des maux croisés, pérégrinations ad libitum d'un psychiatre des sympathies, des perplexités paradoxales & des hégémonies culturelles...

Croiser l'actualité, les maux qui la parlent et les mots qui la hantent...

Malaise dans la "transition" culturelle, 4. "Burn-out" de la "transition" générationnelle numérique par le langage machine des "plateformes", avec le critique du "transit" autoroutier Ivan Illich...

Publié le 21 Octobre 2023 par Serge Aron

Habitué pourtant au surf sur les flux de code du "langage machine", le jeune geek féru d'informatique qui voudrait aujourd'hui s'inscrire sur la plateforme "Mon Master" manifeste une urgence folle à tout casser. Confronté aux innombrables "maux de passe" l'empêchant de passer, notre geek en colère semble entamer une curieuse "transition" genre "black-bloc"… (illustration tirée d'un article de Minh Dréan intitulé "Mon master: les ratés de la nouvelle plateforme de vœux pour les étudiants", Le Monde, 18 avril 2023)

Habitué pourtant au surf sur les flux de code du "langage machine", le jeune geek féru d'informatique qui voudrait aujourd'hui s'inscrire sur la plateforme "Mon Master" manifeste une urgence folle à tout casser. Confronté aux innombrables "maux de passe" l'empêchant de passer, notre geek en colère semble entamer une curieuse "transition" genre "black-bloc"… (illustration tirée d'un article de Minh Dréan intitulé "Mon master: les ratés de la nouvelle plateforme de vœux pour les étudiants", Le Monde, 18 avril 2023)

Playlist personnelle en plateforme musicale impersonnelle

Il y avait la "transition climatique", la "transition de genre", reste la "transition numérique" et le tour d'horizon des signifiants de l'époque est presque bouclé. Tout se passe comme si nous nous étions collectivement abandonnés à cette croyance progressiste religieuse que l'accélération des flux par l'automobile puis le numérique allaient nous libérer des contraintes physiques & temporelles. Patatras, le "transit" autoroutier souffre de constipation.

Comme le montrait dès le début des années 70 le philosophe de la "convivialité" Ivan Illich à propos notamment de cette démocratisation de l'automobile qui nous a paradoxalement précipité dans l'immobilisme des bouchons, à l'ère des "coordonnateurs de parcours" les plateformes numériques des autoroutes de l'information aggravent la pollution des ambiances conviviales et des climats socio-météorologiques et nous confrontent aujourd'hui à l'absence d'interlocuteur durablement concerné en matière de service public. Bref, les contraintes physiques & temporelles, loin d'être réduites, s'en trouvent démultipliées. Et un "burn-out" généralisé semble tous nous guetter…

« Lorsqu'une activité outillée dépasse un seuil défini par l'échelle ad hoc, elle se retourne d'abord contre sa fin, puis menace de destruction le corps social tout entier » (Ivan Illich, La Convivialité, p. 11), prévenait dès 1973 le philosophe Ivan Illich, ce prêtre et ancien diplomate au Vatican très au fait de la "corruption du christianisme" et plus généralement de l'évolution perversement paradoxale des monopoles institutionnels religieux, scolaires ou médicaux.

Passé maître dans cette "critique peirastique" définie par Aristote comme méthode consistant à argumenter uniquement « en partant des prémisses correspondant aux croyances de l’interlocuteur » (Aristote, Réfutations sophistiques, 2, 165 b 4-6), - croyances, précisait Aristote, « nécessairement connues par celui qui prétend détenir un savoir spécialisé » - Illich n'aura de cesse de dénoncer la "contre-productivité" des grandes institutions de nos sociétés industrielles modernes qui à leur insu s'érigent en obstacles à leurs propres finalités.

Ces "paradoxes illichiens" que chacun est amené à rencontrer dans sa vie ou son environnement proche mettent en lumière une médecine qui nuit à la santé, une école qui abêtit, une vitesse des véhicules de transport qui ne réduit pas le temps consacré aux déplacements et des communications devenant si denses et envahissantes que plus personne n'écoute ou ne se fait entendre!…

À l'ère des "co-ordinateurs" communiquant il n'y a plus personne à qui "parler"…

Le médecin est moins aujourd'hui cet interlocuteur professionnel durablement engagé par la confiance que son patient lui accorde personnellement qu'un "coordonnateur" ou "coordinateur" interchangeable déroulant machinalement le menu standardisé des Protocoles de Soins et autres Recommandations de Bonnes Pratiques. Tandis que les partenaires sociaux qui représentaient les assurés sociaux auprès de la Sécurité Sociale se voient peu à peu remplacés par des agents de l'administration managériale d'État, la tutelle administrative qui Rémunère aujourd'hui le médecin sur des Objectifs de Santé Publique (ROSP) se mue peu à peu en néo-mandarin de la médecine, déshonorant chaque jour davantage cette profession jadis vouée au contraire à prendre soin de patients s'acquittant d'honorables honoraires le plus souvent remboursés ensuite par la Sécurité Sociale et les Mutuelles…

La parole échangée en personne "honore" quand les plateformes impersonnelles de communication "déshonorent"…

Par de bien mauvais Tours des impasses de la "raison" managériale un Fou de passage fût mis en échec. Gageons que sur cet échiquier paradoxalement complexe des climats de soin & des soins du climat les Tours de garde n'auront pas toujours "raison" de la diagonale "imaginale" du psychiatre-psychanalyste bachelardien suffisamment Fou…

Par de bien mauvais Tours des impasses de la "raison" managériale un Fou de passage fût mis en échec. Gageons que sur cet échiquier paradoxalement complexe des climats de soin & des soins du climat les Tours de garde n'auront pas toujours "raison" de la diagonale "imaginale" du psychiatre-psychanalyste bachelardien suffisamment Fou…

Plus personnellement, par-delà ces considérations professionnelles plutôt générales, si le "licenciement pour faute grave" qui m'a "humilié" l'an passé au sein d'un établissement entamant sa "transition" vers les plateformes de soins et la "transformation comptable de l’offre médico-sociale" a pu au bureau des conciliations des prud'hommes trouver par le haut une issue plus favorable, (cf. Petite musique de chambre d’un "psychiatre à l’isolement" suffisamment "fou" pour conjoindre à la critique d'une prétendue "modernité" managériale l'aspiration au concert de la refondation culturelle du "climat de soin" & du "soin du climat") je demeure fortement sollicité par le vertige de défiance affolée de ma chère mère - dramatiquement confrontée à ce nouveau handicap nommé "illectronisme" - face à la montagne kafkaïenne de démarches administratives numériques à effectuer - sans "autre" analogiquement semblable à qui parler - dans les suites du décès de l'un de mes lecteurs imaginaires les plus fidèles, mon très cher père…

Une autre sorte de "transition" est à l'œuvre, plutôt "générationnelle" celle-là. Dans mon horloge psychique intime si différente des horloges newtoniennes universelles il semble qu'une roue dentée ait tourné d'un cran. Dans l'ordre patriarcal des arbres généalogiques me voici en position de prochain migrant "en transit" vers le royaume dantesque des morts. Après l'âge de pierre et celui du fer, la fin annoncée de l'âge du "feu" pétrolier coïnciderait-elle avec celle de feu le "patriarcat"?. À l'heure du décès paternel, le tour est venu de "L'âge des transitions", titre on ne peut plus prophétique du dernier ouvrage du chronosophe belge Pascal Chabot…

@ suivre...

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